Je dis ange, ils me répondent Dieu.

S'il faut croire en Dieu, j'avouerais qu'il a tes yeux,

qu'il est une femme et que je l'aime.

Il n'est plus temps de savoir si Dieu est ou n'est pas,

s'il est mort ou vivant, s'il faut y croire ou pas.

Je dirais qu’il a pris le train et qu’il a été descendu à Auschwitz.

Il n'est question que de l'accomplissement de soi

et par là même d'appartenance au monde des vivants et des morts,

dans le recueillement des Immortels.

Et s'il fallait y croire,  Dieu ne peut être que s'il est de même nature que l'homme,

c'est à dire inachevé et que son avènement sera à la mesure de l'homme

mesure de sa dépossession.

Dépossédé de Dieu et de lui même, il sera achevé,

tel un chêne, un merle, une rose, une carpe, une agate,

mais avec toujours cette douleur cachée qu'abrite aussi la grâce

et qui se transmue coûte que coûte en désir mendiant d'exister.

Lové comme cela sur toi même, tu n'es pas habitable.

Alors je me dresse, la peau arrachée de ciel bleu,

mon visage dans la morsure du feu, je jette, sans rimes ni prudence,

la haine, le masque, la naissance et des morts qui me hantent , je ranime l'or.

Les mots de leurs lèvres sonnent le triomphe et le virtuel éclat

qui de l'ombre jaillit en infini combat, éternité de fièvre.

L'horreur de leurs cris réveille les heures, même la folie en rougi.

Par ma bouche ornière je respire parce qu'ils étouffent,

parce que l'oubli est le début du mépris.

Sinon,

le pollen inhumé de nos parures inhumaines nous condamne à n'être que sonorités,

éclaboussures et jets de poings.

Contre la peste, peste d'être estampillé,

quand la folie se torche, se vrille à la moelle,

nos répressifs espoirs tiennent de l'aveuglement,

à se ronger l'âme on finit par se courber face au premier messie venu.

Contre la peste de vivre, en souvenance, il ne nous reste qu'à Aimer.




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