La vie m'a rejeté sur une page blanche, j'écris.

O latrines O désespoir

s'il faut prier, je prie pour survivre un peu plus loin,

car l'aube s'avance avec ses morts qui me hantent.

Oui, toujours à l'aube, ils s'avancent, ils se penchent,

comme des dimanches sur les tombes, ils se penchent,

squelettes errants, déshabillés, esprits glacés, en statues par millions,

leurs âmes nous guettent, là-bas à Auschwitz

fer rouge sur la toute vie.

Même le soleil ne peut atténuer leur éternelle plainte:

O que la mort revienne! la vraie, la pure, la douce, la nôtre.

Écoutez l'enfant écartelé de sa mère, mutilé de sa mort,

il hurle de toutes ses chairs broyées, équarri aux barbelés,

dans l'attente d'une mort retrouvée, d'une mort lavée de tout désespoir,

dans l'attente de sa mort à lui, ouverte et tranquille.

Il est Immortel,

dans la forêt où rumine la lumière fécondée par le vent,

tilleul cuivré, il se tient debout

comme l'apparition de mon propre cadavre en souffrance.

Depuis l'ange ni ne vole, ni ne plane ,

c'est d'un pas lourd et assuré qu'il marche sur le sentier,

à la lueur des bruyères, dédaignant les larges routes,

aveugle, il se guide à la musique des silences et des plaintes immortelles.




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