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ÊTRE
31 Être vivant , quel orgueil ! quand on est que l'écho d'une mort très ancienne . 32 Chaque jour creuser les mots craque la neige , les doigts s'effacent , même la lune n'est plus sûre , l'instant sans leurre s'abîme , la mémoire est un bûcher ; errer à la quête du levain nocturne ou d'une brèche qui vive . 33 N'y aurait-il pas une parcelle d'invisible où se confondent la rose et l'homme ? . 34 En carrosse , une cruche transporte en pluie les fruits de la ruche d'un si riche été . 35 Ne sommes nous pas des simulacres prisonniers de nos oracles , qui vacillent à la première bouffée d'éternité ? . 36 L'été passe avec ses flèches , nous avons joui dans ses fouilles où brillent les jeunes filles qui s'envermeillent à la grâce des glaives , les cheveux dénoués de genêts , de soufre et de feuilles fanées , sereines à la nuit elles s'avancent ; en bouquet sous leurs pas il me faut m'étendre , triste somme la terre me penche et me tuile , il me faut caresser chaque matin les milles petites filles du Vésuve , nymphes bleutées ,lucioles sur le crépuscule , quand le soleil me rince des pluies de Septembre , moi humble mastaba au soleil du muguet . 37 Sur la table dressée une rose en bas noirs fixe l'heure sur son corsage il y a le sang des tenailles et des supplices ses pétales carmins sont des éclats de cœur la rose est belle et règne la brute il y a trop de sang sur le jour . 38 La lumière neige sur les vignes violettes la rose grise cantate Pégase luit c'est une femme lune , de la mort éperdue qui se livre et s'estompe , fougère , fossile d'ailes d'ibis , elle veut luire son premier cri . 39 Obscure maison de briques chaudes de brindilles , de gaz qui embrase le livre le temps est un labyrinthe de corps en corps , en pèlerinage de nef en nef de mystères en racines à la ferveur des moissons offertes . 40 Ne suis-je pas celui que des chiens invisibles dévorent déjà ? . Pages 4 1 2 3 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 |