LEPOWEB


ÊTRE

111

Le cœur terril , Aladin , sans lueur

marche marche

une rose l'éclabousse , une pierre le croc-en-jambe

il tombe tombe

ruisselant dans le vert fossé

sans pleurs sans cris

par la nuit dévoré

le cœur terril et sans lueur

Aladin se meurt .

 

112

Tout l'azur qui veut

renverse la terre qui peut

avec sa sœur la lune l'homme le veut

quand la nuit pleut seul le soleil le peut

et c'est tant mieux .

 

113

Au plus nocturne de la chambre

quand le gong fait vibrer l'échelle subtile

Dieu aux pieds chaussés de cathédrales caduques

ressemble à ce chat aux yeux d'ambre

nageant dans l'œil d'une lune qui s'ennuie .

 

114

Il y a une mare au bas des villes

où la foule lente tintinnabulante

se répand , s'écroule et se noie .


115

Il n'habite plus ,

il écoute au pouls de la fontaine

le bruissement des fleurs ,

requin harponné , arbre traqué

il s'enfuit et délaisse de lui même

l'homme la vague la source

pour être peut être .

 

116

C'est un peu , un presque rien , un peu de rouge , un peu de fraises

quelques rides comme un sourire , un panier , une brèche

une tresse au bas d'un mur ,

c'est un peu , un presque rien , au-delà de toute détresse ,

elle est là , brune , pieds nus , à genoux sur un trottoir

à Lima

arc en ciel sur la saleté , avec des fraises dans son panier d'osier

comme la plaie d'un soleil endeuillé .

 

117

Le style est la distance que tu t'imposes entre toi et les autres .

 

118

Pluie glaise page cendrée

comme un Mai mouillé

la sève lente féline

se caravelle d'embruns

et fait ricocher l'homme de batailles

en mariées cinglantes .

 

119

Plus d'un visage dérobé erre de vitrines en miroirs

malheureux sans plus d'intime soi ,

d'autres ont trop de têtes pour avoir un visage


120

Ariel sur le seuil mâté

à ta rencontre

je précède ma mort .



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