LEPOWEB


ÊTRE

281

La lune est morte

notre oeil en porte le deuil .

 

282

Rien qui vaille sur cette terre

plus que sous la peau .

 

283

L'oiseau vient boire à ma blessure

je me nourris de la faïence des vergers

du duvet des caresses , des sédiments d'iris

mon pain veuf d'hirondelle

est une orange gracieuse sur pointe d'ombrelle .

 

284

Le lac déploie sa durée

golfe velu , étal vert

un possible vivre entre roc et jonc

foudre femme et baie de nuit

fertile sentier à la citadelle accroché par où le baiser gagne la fleur .

 

285

Doigt divin , il en elle vague , bâille , bascule , blette , bondit ,

mugit , fonce , blême , mauve , larme , dure , morve bleue

l'œil dans la veine coule ;

là-bas un ermite mâche l'onyx .


286

Volpone pleure

Venise à genoux s'envase en clapotis

tu n'es qu'un songe O Venise un miracle

une grimace qui s'écroule .

 

287

S'élève la rose des fossés

et sur le chemin forestier le saule déchire le lac frangé d'or

où viennent mourir les heures .

 

288

L'œil se durcit

risque une épine ,

et vomit en ronds de lune .

 

289

Un cygne aux ailes de craie

mutilé de sa propre mort

traîne cou en avant

une cathédrale

sur ces champs vallonnés

où des gerbes de cyprès chuchotent aux blés :

- là bas la mer ! .

 

290

Le jardin épais se fripe à la chaleur

les bouquets gonflés de mélodies se masquent de crinolines

lapidée par les saisons une fresque ciselée par un hiver pyromane

se creuse friable au regard

de notre saccage intérieur .



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